Il ne suffisait pas que les médias aient servi leur version sans nuance ni recul pendant deux jours avant qu’une seconde version, appuyée par différents témoignages, ne vienne lézarder le discours officiel.
Aveuglement corporatiste
Les syndicats de policiers, certainement amers de ne pas voir réussi à imposer leur version, plutôt que d’adopter une position prudente et équilibrée, ont fait le choix du corporatisme au détriment de l’intérêt général, le leur compris : personne ne sortira grandi de cette affaire, si chacun ne travaille pas à établir justice et vérité.
Selon le site Internet d’Europe 1, commentant les graves dérapages de policiers sur Facebook, Patrice Ribeiro, secrétaire national du deuxième syndicat d’officiers, Synergie-officiers, n’hésite pas à évoquer un « contre-feu pour faire oublier ce qui s’est passé à Trappes ». Plus invraisemblable encore, ce dernier estime que « cela ressemble a une énorme manipulation ».
Cette posture est choquante, même si caractéristique de la culture syndicale en France : on défend ses collègues, sa corporation, son clan. Le reste passe après. Il aurait pourtant suffi à Patrick Robeiro de procéder via Google par exemple à quelques vérifications accessibles à un élève de primaire, ce qui ne l’aurait pas empêché par ailleurs de faire état d’un scepticisme, dénué alors de l’outrance, dont il fait aujourd’hui preuve.
La police des polices enquête et sanctionnera
Son collègue Frédéric Lagache, secrétaire général adjoint d’Alliance, deuxième syndicat des gardiens de la paix, précise Europe 1, a quant à lui été plus mesuré. Il doute, ce qui est légitime : « J’émets une très grande réserve sur ce genre de sites », et ajoute « Mais si les faits sont reconnus, ce n’est pas acceptable. » La condamnation est molle au vu des propos qui ont été tenus. Pour autant, elle tranche avec le déni de Patrice Ribeiro, qui démontre que tant que les relations des policiers avec la population seront politisées la situation n’évoluera pas.
On comprend le désarroi de ces syndicats qui ne veulent pas donner l’impression aux émeutiers qui ont pris à parti les policiers à Trappes qu’ils reculent. Malgré tout, ni Frédéric Lagache, ni Patrick Robeiro ni encore Thierry Mazé, policier syndicaliste qui sur toutes les antennes de télé répète sans rire qu’il y a eu, lors du contrôle de la jeune femme au niqab, tentative de meurtre par étranglement de la part de son époux, ne sont autorisés à agir, par corporatisme, comme ces cheminots syndicalistes qui n’hésitent pas à prendre en otage les usagers des transports en commun pour faire plier leur direction. Il y a eu des dérapages graves de la part de policiers. L’Inspection générale de la police nationale (IGPN) n’aura aucun mal à retrouver les auteurs des propos incriminés, puisque ces derniers publiaient leurs messages sous leur véritable identité. Une fonctionnaire mise en cause a d’ailleurs pris les devants en intervenant ici-même pour s’expliquer et regretter ses propos.
Lire – Dérapages de policiers sur Facebook : une fonctionnaire mise en cause s’explique
Terminons avec les propos de Pierre-Henry Brandet, porte-parole du ministère de l’Intérieur, qui estime que « si les auteurs des commentaires étaient effectivement des fonctionnaires de police, ce serait d’autant plus inacceptable. » Et d’ajouter : « Ce sont des propos violents, choquants, provocateurs, pour certains racistes. Donc à partir du moment où l’on peut établir, et c’est l’enquête qui devra le déterminer, que ce sont des policiers qui les ont tenus, les poursuites disciplinaires seront engagées par la direction générale de la police », précise Europe 1.